Les SSII ont la faculté de toujours viser plus juste en ce qui concerne la démotivation des salariés, elles en sont même devenues le modèle de référence.

J’ai passé plusieurs mois en intercontrat, et une mission m’a enfin été proposée cet été, il s’agissait d’une mission en binôme, et je devais en être le principal responsable.

Illusion : j’ai juste été présenté au client parce que plus expérimenté, pour afficher une façade technique et un niveau d’anglais potable.

Dès que le client a validé le transfert de compétences fait avec l’ancien prestataire, on m’a informé que je ne faisais plus partie du casting, que je redeviens un intercontrat, mais qu’on me ressortira du placard lors des vacances de celui qui a été désigné.

Je suis trop vieux et trop cher pour les niveaux de marge qu’il est nécessaire d’atteindre, mais assez compétent pour m’afficher devant un client et le rassurer.

Cette attitude des auto-proclamés « managers » en SSII est partout la même : en réalité, ils ne managent rien, puisqu’ils n’ont rien du pouvoir qu’ils croient posséder.

Ce sont juste des pions qui ont des indicateurs à afficher en vert sur des feuilles Excel (1) qu’ils présentent très sérieusement à des « comités de pilotage » et autres « comités de direction », dans lesquels se pavane trop souvent le gratin de l’incompétence technique et managériale, qui a néanmoins suffisamment de talent politique (et d’absence de conscience) pour être arrivé dans ces comités.

Il faut bien comprendre qu’il est usant avec le temps de devoir toujours  remettre en cause ses connaissances pour chaque nouvelle mission : oublier les noms, les fonctions, l’organisation, l’environnement technique, les métiers de chacun, les logiciels à utiliser, les procédures, et parfois, plusieurs fois par an.

Chaque entreprise a des spécificités, et tout n’est pas transposable : ce qui peut paraître intéressant à la sortie des études (quand tout est nouveau) devient un calvaire avec les années.

Le plus accablant est que ce savoir est jetable, qu’au mieux une mission durera quelques mois (1 mois ½ pour la dernière en date me concernant.), et qu’il n’y aura aucun retour sur l’investissement personnel, aucune réutilisation.

D’autant plus que l’expérience acquise n’est pas un paramètre pris en compte pour les missions futures. Le commercial et sa marge sont les seuls critères de choix, et échappent donc aux premiers concernés.

Non seulement cette succession de missions est usante, mais en plus elle ne permet pas de bâtir un parcours cohérent.

C’est d’ailleurs une des thèmes favoris des entretiens annuels, au cours desquels il est courant d’utiliser l’argument d’une mission sans intérêt, mais imposée par le management, au nom de l’esprit d’entreprise, pour refuser une augmentation ou une évolution.

J’attends maintenant d’être convoquée par les RH pour m’entendre dire que je n’ai pas été à la hauteur de la mission.

(1) Il y quelques semaines, un de ces brillants personnages s’est calé dans son fauteuil en me disant solennellement : « nous, les managers, nous avons besoin d’indicateurs ». Que feraient-ils sans Excel ?