Ils sont vraiment tous aux fraises, en ce moment, dans les cabinets de recrutement.

Des baffes se perdent, et en quantité.

Leur racolage du jour porte sur des profils « Java/J2EE », pour lequel mon CV aurait retenu « toute leur attention ».

Peut-être ont-ils abusé de substances illicites, ce qui me semble le minimum pour aller s'imaginer que je possède un atome de compétence dans ce domaine après voir lu mon CV.

Mais rien ne les arrête, les mails ne coûtent pas assez cher : il faudrait les taxer (ce qui pourrait arriver avec un des prochains plans de rigueur).

Dans la plus pure tradition des incapables qui se disent en quête de candidats, ils demandent mon CV, alors qu'ils l'ont déjà, puisqu'ils l'ont « sélectionné ». Cherchez l'erreur.

Il faut même, luxe suprême, certainement du à la pénurie, que je leur précise pour quelles entreprises je veux travailler, et de quelle façon, selon des modalités dont les nuances m'échappent : soit y être « positionné », soit y être « intégré » (si un lecteur sait de quoi il s'agit, merci de me le dire).

Suite à ces informations, que je ne leur donnerai évidemment pas, ils sont supposés « revenir vers moi », comme on dit dans les cabinets, afin de « valider ces points ».

Dommage qu'ils soient si loin, j'aurai bien aimé valider avec eux quelques poings...

Et s'ils allaient tous se faire voir, au hasard, chez les grecs, tous ces ânes ?

Qu'ils le sachent : je ne postule que pour des missions d'intérim : c'est beaucoup plus transparent, et beaucoup plus avantageux.

Malheureusement, la crise aidant, les missions y sont aussi de plus en plus rares.

Pas possible ! Mais c'est tous les ans alors ? Le 13 novembre, journée de la gentillesse ?

Désolé, je n'ai plus la force d'être gentil, ne serait-ce qu'un jour par an : assez d'avoir été un gentil employé, qui a fait gentiment son travail, en respectant ses gentils collègues, en suivant les règles du jeu, pour finalement se retrouver gentiment au chômage de longue durée.

C'est bien beau comme concept, bien dégoulinant de bien-pensance, tellement dans l'air du temps des zinzindignés.

Pour beaucoup d'adeptes de cette journée, c'est un moyen facile de légitimer à bon compte le fait de se comporter comme le dernier des salauds 364 jours par an, et même 365 les années de jeux olympiques.

J'en ai assez de ces donneurs de leçons, mais je vais leur donner un bon conseil à tous : vous devriez vous mettre en contact avec la SNFCP (http://www.snfcp.org/), brillante société savante qui organise les journées de la proctologie, et ça tombe bien, c'est en novembre aussi.

En réunissant vos journées, vous saurez où, et comment vous les ranger sans risque, ces valeurs que tant prônent et que si peu respectent.

« Il y a des moments de la vie où une sorte de beauté naît de la multiplicité des ennuis qui nous assaillent. »

Marcel Proust, « Albertine disparue »

Avec le temps, je devrais être habitué à entendre des foutaises lors des entretiens, et ne plus me formaliser du décalage entre les paroles et les actes.

Mais je n'y arrive pas : l'honnêteté est une irrémédiable tare dont je n'arrive pas à me défaire et qui me pousse à penser qu'un recruteur peut parfois, dans un moment de faiblesse, dire la vérité.

Les propos auxquels j'ai eu droit lors d'un des derniers entretiens que j'ai passé, et qui constituait la deuxième étape d'un processus de recrutement à rallonge, auraient pourtant du me mettre la puce à l'oreille.

C'était trop beau pour être vrai.

Parmi les nombreuses salades, j'avais eu droit au caricatural : « il n'y a pas de piège ici, nous jouons carte sur table, nous cherchons à mieux vous connaître ». Ce à quoi j'avais failli répondre, mais j'ai évité de le faire grâce à un effort surhumain : « oui, je le sens bien votre intérêt pour ma personne, d'ailleurs, j'ai déjà mal au cul » (1).

Ces pantins m'avaient dit que je recevrai, dès la semaine suivante, une proposition de collaboration éventuelle, mais quoi qu'il en soit, je pouvais avoir la certitude d'être tenu au courant de la suite donnée à ma candidature.

L'absence de réponse depuis plus de trois semaines, et ce malgré mes multiples relances auprès de tous les interlocuteurs que j'avais eu, fait que je connais maintenant la suite donnée à ma candidature : la corbeille.

Que de temps perdu, mais il est vrai qu'en ce moment, ils n'ont que ça à faire : passer des entretiens et trier des CV, puisqu'il n'y a aucune mission en vue, et qu'une amélioration ne semble pas attendue avant plusieurs mois.

(1) Ma patience ayant atteint ses limites, ce blog pourrait désormais se voir régulièrement émaillé de propos grossiers, vulgaires, et autres allusions graveleuses : ça défoule.