Ce matin le débat économique hebdomadaire de 7h50 sur France inter portait sur les engagements du gouvernement sur le climat (1).

Le débat de chiffres, en plus d’être comme souvent centré sur l’électricité, a tourné au ridicule, avec par exemple « les éoliennes sont plus soutenables que le nucléaire ». 

On s’en fout: le problème est que 67% de l‘énergie utilisée en France est d’origine fossile (au niveau mondial c’est plus de 80%).

Pour une simple question d’échelle et de ressources, les énergies fossiles ne seront jamais remplacées, à leur niveau d’utilisation actuel, par des éoliennes, des panneaux solaires, des barrages, ou du nucléaire. (2)

C’est aussi oublier un peu vite qu’un parc éolien ou solaire doit être impérativement associé à un parc «  classique », en général des centrales à gaz, pour pallier l’intermittence, sans parler de la durée de vie de ces équipements (environ 25 ans) et de leur recyclage difficile.

Le sommet de l’incompétence a été atteint sur la question du pétrole (qui accessoirement représente 98% de l’énergie utilisée dans les transports): d’après l’un des intervenants (vers 10mn30) le pic pétrolier serait une théorie dont « on sait maintenant que ce n’est pas vrai ».

(Il parle aussi des réserves de gaz et pétrole qu’il ne faudrait pas utiliser, il oubli le charbon : double faute)

Dire que le pic pétrolier est une fausse théorie revient à dire dire que puiser de façon infinie dans un stock fini est possible, ce que seuls les prestidigitateurs et les économistes savent faire.

D’autant que l’agence internationale de l’énergie dit dans son rapport de 2018 : (3)

«  La production de pétrole brut conventionnel a atteint son maximum en 2008, à 69,5 Mb/j, et elle a depuis baissé d’environ 2,5 Mb/j. 

Dans le scénario « Nouvelles politiques », elle baisse de 3 Mb/j supplémentaires entre 2017 et 2040, et sa part dans l’offre mondiale de pétrole baisse régulièrement, passant de 72% aujourd’hui à 62% en 2040. 

Le niveau des ressources conventionnelles dont le développement a été approuvé ces dernières années est bien inférieur aux exigences de la demande du scénario Nouvelles politiques, ce qui créera un risque de tension sur le marché dans les années 2020. »

Et: 

« Le risque de resserrement de l’offre est particulièrement prégnant pour le pétrole. Ces trois dernières années, le nombre moyen de nouveaux projets approuvés de production de pétrole conventionnel ne représente que la moitié du volume nécessaire pour équilibrer le marché jusqu'en 2025, compte tenu des perspectives de demande du scénario « Nouvelles politiques ». Il est peu probable que le pétrole de schiste prenne le relais à lui seul. »

En bref, nous sommes mal barrés: entre les prévisions de l’AIE, les élucubrations des économistes, et l’incompréhension des enjeux par les dirigeants économiques, politiques, et souvent d’entreprises, l’avenir est plus que jamais compromis.

Pour plus d’information sur le pétrole : https://youtu.be/LeDzFEyICXI

Et pour en savoir un peu plus sur l’énergie en général et le climat, voir le cours (8 fois 2h) donné à l‘école des mines sur : https://slides.pimoid.fr/jancovici/mines_2019/


(1) Emission du 20 novembre: https://www.franceinter.fr/emissions/le-debat-economique

(2) Et encore moins par l’hydrogène comme des fantaisistes avides de subventions nous le promettent : faire de l’hydrogène nécessite de l’énergie, celle utilisable avec l’hydrogène produit sera forcément inférieure à celle utilisée pour le produire, donc autant utiliser directement l’énergie en entrée. Sans parler du stockage.

(3) Le site de l’AIE ne le propose pas en entier, mais des extraits sont disponibles ici: https://fr.wikipedia.org/wiki/World_Energy_Outlook